La question que je me posais constamment était: que fait un traducteur qui se heurte au fonctionnement d'un discours légitime circulant parmi des interlocuteurs usagers qui, une fois la traduction faite suivant les "règles du bon usage", s'attaquent à la corriger et à la rendre plus "technique"? Comment trouver un compromis entre la norme et l'usage, a fortiori dans le cas d'un jargon que l'on a du mal à comprendre en tant que non spécialiste? C'est ce sentiment de tiraillement qui m'a poussée à me demander si l'on pouvait concevoir un modèle d'analyse rendant compte des phénomènes observés dans les textes mais aussi des pratiques langagières des usagers légitimes d'un discours de spécialité. Heureusement, je n'étais pas seule à réfléchir sur cette question: j'ai trouvé, en lisant des articles et des textes spécialisés en linguistique, traduction et terminologie, que mes préoccupations étaient partagées des terminologues, des professeurs universitaires et des traducteurs, notamment dans le courant des dix dernières années et autour d'une nouvelle perspective d'analyse: la "sociologie des discours" ou plus précisément la "socioterminologie".
Le choix de cette nouvelle approche m'a fait éprouver la nécessité de redéfinir mon objet d'étude primitif, le gallicisme, dans un cadre descriptif et non pas prescriptif. Cette décision m'a conduite à élargir la notion de gallicisme vers celle d'emprunt,, "le phénomène sociolinguistique le plus important dans tous les contacts de langue" (je souligne), et c'est finalement cette notion-ci qui m'a ouvert la voie vers d'autres concepts que ce travail se propose de mettre en rapport en vue de l'analyse d'un discours passionnant: celui de la psychanalyse en langue espagnole.